Qui était Jose Menendez, le père des frères Lyle et Erik Menendez ?

José Menendez, père assassiné ou bourreau familial ? Derrière les portes closes d’une villa de Beverly Hills, se cache une histoire d’emprise, d’abus et de secrets qui refont surface, des années après le drame.

Jose et Kitty Menendez
© ABC
Jose et Kitty Menendez

Il sourit sur les photos, costume impeccable, regard sûr de lui. José Menendez a tout du père modèle version années 80 : businessman à succès, maison luxueuse à Beverly Hills, deux fils brillants, une femme élégante. Mais sous le vernis, l’histoire est tout autre.

Car derrière les murs de la villa de Calabasas, le chef de famille règne sans partage. Charismatique, autoritaire, parfois brutal, José incarne cette génération de self-made men qui confondent ambition et domination. Il est celui qui décide, impose, contrôle — jusqu’à l’excès. Et ce qui devait être un conte de réussite familiale va lentement se transformer en huis clos toxique, ponctué de silences, de tensions… et d’un secret que ses enfants finiront par faire exploser.

Quand les tirs retentissent dans la nuit du 20 août 1989, c’est tout un mythe qui s’écroule. Le rêve américain vient de virer au cauchemar, et au cœur de cette chute : la figure glaciale d’un homme qui pensait tout maîtriser.

José Menendez : le patriarche qui contrôlait tout, jusqu’à l’implosion

Né à La Havane en 1944, José Menendez fuit Cuba à l’âge de 16 ans, poussé par un père inquiet face à la montée du régime castriste. Direction les États-Unis, où il est accueilli par des parents éloignés dans une banlieue tranquille de Pennsylvanie. Le déracinement est brutal, mais José s’adapte vite. Il apprend l’anglais à la vitesse de l’éclair et se fait remarquer comme nageur prometteur, décrochant une bourse pour l’Université de Southern Illinois. C’est là qu’il rencontre Mary Louise Andersen, surnommée Kitty, qu’il épousera quelques années plus tard.

Rapidement, José délaisse la natation pour se concentrer sur son objectif : réussir. Diplômé en comptabilité du Queens College, il se lance dans les affaires avec une ambition féroce. Dans les années 1980, il s’impose comme un acteur incontournable de l’industrie musicale. De RCA à LIVE Entertainment, il gravit les échelons à une vitesse fulgurante.

Visionnaire, intransigeant, il est à l’origine de contrats majeurs avec des groupes comme Duran Duran ou les Eurythmics. Selon le journaliste Robert Rand, auteur de The Menendez Murders, José Menendez gagnait alors près de 500 000 dollars par an — une fortune qui symbolisait son triomphe dans l’Amérique reaganienne.

Mais derrière cette réussite spectaculaire se cache une autre facette, plus sombre, que l’on découvrira bien plus tard, dans les prétoires d’un procès hors norme.

Une relation conflictuelle avec Kitty Menendez

Leur histoire commence en 1963, sur les bancs d’un cours de philosophie à l’Université du Sud de l’Illinois. José a 19 ans, Kitty en a 21. Ils se voient souvent, très vite, trop vite peut-être. Le 8 juillet, à peine quelques mois après leur première rencontre, ils se marient — contre l’avis de la famille de José. Mais lui balaie les critiques d’un revers de phrase, lucide et provocateur, rapportée plus tard par le Los Angeles Times :

« Si j’ai l’âge de vivre seul à 16 ans, j’ai l’âge de me marier à 19. »

Le couple s’installe à New York. José reprend ses études au Queens College pendant que Kitty abandonne sa carrière d’enseignante pour se consacrer à leur vie de famille. En apparence, ils incarnent le rêve américain. En réalité, les fondations sont déjà instables.

Au fil des années, Kitty s’enfonce dans une profonde dépression. Les absences de José, ses infidélités répétées, l’obsession de l’image parfaite... tout cela laisse des traces. Diagnostiquée suicidaire par son thérapeute, Kitty lutte contre des épisodes de désespoir, des troubles de santé mentale, et finit par s’enfermer dans une dépendance aux médicaments et à l’alcool. Au procès, ce portrait d’une femme brisée, coincée dans une cage dorée, tranche avec les photos de famille.

Le mariage, autrefois flamboyant, n’est plus qu’un vernis. Derrière la façade des dîners mondains et des enfants en costume-cravate, règne une tension constante. Kitty, rongée par les trahisons de José, est décrite par des proches comme obsédée par le regard des autres, incapable de fuir un homme qui, selon les mots des procureurs, savait parfaitement manipuler son entourage.

Quel père était Jose Menendez pour Lyle et Erik ?

Lorsque Lyle et Erik Menendez ont abattu leurs parents dans leur salon de Beverly Hills, l’Amérique a cru à un mobile simple : la cupidité. Deux fils qui éliminent père et mère pour mettre la main sur une fortune. Mais dès l’ouverture du procès en 1993, cette version vole en éclats.

Lyle Menendez accuse frontalement son père de l’avoir violé à de multiples reprises, entre l’âge de six et huit ans. Son frère Erik déclare, lui, avoir été agressé sexuellement pendant plus de douze ans, jusqu’au jour du double meurtre. Selon ses mots, José Menendez le forçait à des fellations régulières, le menaçait physiquement, et l’obligeait à se taire sous peine de détruire la famille.

Dans The Menendez Murders, Robert Rand rapporte qu’à l’âge de 17 ans, alors qu’il tente pour la première fois de repousser José, ce dernier lui colle un couteau sous la gorge. Ces révélations transforment radicalement le regard sur l’affaire. Car ce ne sont plus deux enfants gâtés, mais deux jeunes hommes brisés qui décrivent un climat familial fait de peur, de contrôle et de viols incestueux.

Les psychiatres appelés à la barre, dont Jérôme Oziel, évoquent un "syndrome du survivant", une dissociation extrême et une rage longtemps contenue. Kitty Menendez, selon plusieurs témoignages, savait — ou du moins, soupçonnait — sans jamais agir.

Et pourtant, malgré ces récits glaçants, aucune preuve médico-légale n’a jamais pu corroborer les accusations. Aucun dossier, aucune plainte, aucun examen. Ce flou alimente les doutes depuis plus de 30 ans. Pour certains, c’est la parole de victimes que la justice a ignorée. Pour d’autres, une stratégie cynique pour échapper à la perpétuité.

Mais qu’on y croie ou non, une chose est certaine : derrière les grilles dorées de la villa Menendez, quelque chose d’impardonnable s’est joué. Et ce n’est pas la violence des balles qui a d’abord tué cette famille — c’est celle des années de silence.

Un chanteur accuse Jose Menendez

En mai 2023, l’affaire Menendez connaît un rebondissement aussi inattendu que troublant. Dans le documentaire Menendez + Menudo : Boys Betrayed, diffusé sur la plateforme Peacock, Roy Rosselló — ancien membre du boys band portoricain Menudo — accuse José Menendez de l’avoir agressé sexuellement en 1983. Il avait alors 13 ans.

Selon Rosselló, l’agression aurait eu lieu alors que José était cadre chez RCA Records, le label qui gérait Menudo à l’époque. Le manager du groupe aurait conduit l’adolescent au domicile de Menendez à New York. Là, affirme-t-il face caméra, il aurait été drogué, puis violé. Le témoignage est glaçant, précis, et renforce la version longtemps contestée de Lyle et Erik, selon laquelle leur père était un prédateur sexuel protégé par son pouvoir et sa position.

Quelques heures seulement après la diffusion du documentaire, les avocats des frères Menendez déposent une requête en habeas corpus auprès de la justice californienne, le 4 mai 2023. Leur objectif : faire rouvrir le dossier sur la base de ces éléments inédits, qui n’avaient jamais été examinés lors des procès des années 1990.

Si la requête est acceptée, elle pourrait aboutir à un nouveau procès, ou du moins, à une révision des peines. La décision finale revient désormais à un juge. Trente-cinq ans après les faits, l’affaire Menendez n’est donc peut-être pas terminée. Et la figure de José Menendez, longtemps perçue comme celle d’un père modèle assassiné par ses enfants, pourrait bien être réévaluée à la lumière de vérités longtemps enfouies.

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