Selon le dernier rapport de Women in Games, si on a avancé d'un pas, on trébuche encore sur les vieilles racines du patriarcat. Avec 24 % de femmes dans les studios français (applaudissements timides), on est loin de la parité rêvée. Côté joueuses... elles sont là. Passionnées. Mais doivent souvent jouer à cache-cache avec leur genre pour éviter le harcèlement. Et dans l'esport ? Disons juste que les femmes cherchent encore leur place au premier rang. Alors, des progrès, oui, mais à la vitesse d'une tortue asthmatique.
Une insertion dans le milieu professionnel du jeu vidéo encore difficile
Dans les studios de développement français, les femmes représentent désormais 24 % des effectifs, un chiffre en hausse par rapport aux 10,6 % d'il y a dix ans. Malgré cette progression, les disparités demeurent, notamment dans les rôles techniques où les femmes sont moins présentes, tandis qu'une certaine parité est observée dans les métiers artistiques et une surreprésentation dans les fonctions de support.
Les formations en jeu vidéo en France affichent elles aussi une sous-représentation féminine, avec seulement 26 % d'étudiantes. Ces statistiques reflètent les obstacles et les stéréotypes auxquels les jeunes femmes font face dès leur orientation professionnelle.
Les personnages féminins toujours sous-représentées
Malgré la naissance d'héroïnes inspirantes ces dernières années : Aloy (Horizon Zero Dawn) ; Ellie & Abby (The Last of Us) et Clementine (The Walking Dead). Les données sont éloquentes. Selon le rapport, sur les principaux jeux publiés en 2022, 39 % des personnages sont des femmes, contre 61 % d'hommes. Et le chiffre peu glorieux : 31,7 % des jeux vidéo mettent en scène des personnages exclusivement masculins.
Dans les 50 RPG les plus joués ces 30 dernières années, les hommes parlent en moyenne 2 fois plus que les femmes. La part de dialogue laissée aux femmes augmentant de 6,7 % par an, il faudrait donc encore attendre 10 ans pour atteindre une parité stricte, souligne ainsi l'association.
Un secteur encore trop sexiste ?
Avec 67 % des Françaises qui jouent aux jeux vidéo, la présence des femmes dans l'industrie ne peut être ignorée. Pourtant, 40 % d'entre elles ressentent le besoin de masquer leur genre en ligne, et autant ont déjà expérimenté du harcèlement. Le désir de travailler dans le secteur est présent, mais la perception d'un milieu peu accueillant persiste.
Et c'est bien dommage, parce que les femmes peuvent être de ferventes consommatrices de contenus en ligne (Twitch, Youtube...) mais elles restent minoritaires parmi les créateurs et dans l'esport. Elles ne représentent que 11 % des streameurs et 7 % des joueurs esport. La toxicité en ligne et le sexisme sont des freins majeurs à leur participation.
4 joueuses sur 10 affirment ne pas vouloir streamer en raison des comportements déplacés, et 46 % des gameuses jugent les contenus qu’elles voient en ligne trop sexistes ou misogynes. La vague de harcèlement sans précédent visant Manon lors du GP Explorer montre qu'effectivement, le chemin est encore long. Une situation qui interpelle Morgane Falaize, Présidente de Women in Games France :
“Tous ces chiffres tendent à démontrer que le Jeu vidéo, comme d’autres industries créatives et technologiques, s’est construit sur un système sexiste qui entretient les inégalités de genre. Celles-ci s’expriment derrière l’écran (notamment dans les studios de développement), à l’écran (en termes de représentations) et devant l’écran (avec des joueuses, compétitrices esport et streameuses qui connaissent des parcours bien plus chaotiques que leurs homologues masculins). Pour autant, notre industrie sait prendre ses responsabilités. Aujourd’hui les initiatives en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes se multiplient. Aussi je nourris l’espoir qu’elles se transforment en véritables politiques d’entreprise, pérennes, et aux effets tangibles. Rendez-vous dans 2 ans pour un nouvel état des lieux !”
