Jeudi soir sur C8, Yann Moix a encore frappé. Selon lui, tout adulte de plus de 25 ans qui joue aux jeux vidéo est un "demeuré". Rien que ça. Une déclaration qui sent bon les années 90, à l’époque où certains voyaient encore les jeux vidéo comme une sous-culture pour ados attardés. Sauf qu’en 2025, le jeu vidéo est la première industrie culturelle au monde, et surtout, un art à part entière. Histoire d’éclairer un peu notre cher chroniqueur, voici 10 jeux qui prouvent que le médium va bien au-delà de "se souiller le cerveau".
Quand le jeu vidéo devient un refuge, pas une menace
Avant de se lancer dans notre sélection, il nous semblait important de remettre les pendules à l’heure. Parce que non, les joueurs ne sont pas des "demeurés", et encore moins ceux qui ont trouvé dans le jeu vidéo un moyen de surmonter des épreuves. Un formidable article du Monde a mis en lumière comment plusieurs rescapés du Bataclan ont utilisé le jeu vidéo pour canaliser l’angoisse et se reconstruire après les attentats du 13 novembre 2015.
Certains se sont réfugiés dans des mondes apaisants comme Stardew Valley, d’autres ont préféré revivre consciemment leur traumatisme avec des jeux de tir comme PUBG pour retrouver un sentiment de contrôle. La psychologue Vanessa Lalo l’explique bien :
"Le jeu vidéo devient un refuge onirique, un cadre structurant où l’on sait que rien ne peut arriver."
Ce n’est pas un simple divertissement, mais parfois un véritable outil thérapeutique. Une récente étude révèle même que le jeu vidéo peut se montrer plus efficaces que des médicaments, dans les cas de dépression.
Alors, avant de parler d’"abrutissement", peut-être faudrait-il reconnaître que le jeu vidéo est aussi un puissant moyen d’évasion, d’apprentissage et de résilience. Et pour ceux qui en doutent encore – Yann Moix en tête – voici 10 jeux qui prouvent que ce médium est bien plus qu’un passe-temps futile.
1. Disco Elysium – un jeu d’enquête littéraire qui ferait pâlir un auteur
Puisque Yann Moix est écrivain, autant commencer par un jeu qui aurait toute sa place en librairie. Disco Elysium, c’est un RPG narratif où chaque ligne de dialogue est ciselée comme du grand art. On y incarne un détective alcoolique et amnésique, largué en pleine enquête qui va autant questionner le crime que sa propre existence. Le jeu ne se contente pas de raconter une histoire : il vous plonge dans un flot de réflexions politiques, philosophiques et psychologiques, avec une plume acérée et un cynisme ravageur.
C’est du pur roman interactif, où l’action passe par les mots et où chaque choix façonne une intrigue aussi brillante qu’impitoyable. Bref, un titre qui prouve que le jeu vidéo peut offrir des expériences littéraires plus puissantes que bien des pavés en rayon. Yann Moix, lui, poserait sans doute la manette avant même d’avoir saisi la moitié de sa richesse.
2. The Last of Us – de chef-d’œuvre du jeu vidéo à triomphe sur HBO
Si un jeu a prouvé que le jeu vidéo pouvait raconter des histoires aussi puissantes que le cinéma, c’est bien The Last of Us. Ou plutôt The Last of Us et sa suite, deux jeux qui ont bouleversé le médium avec leur narration d’une justesse incroyable, leurs personnages complexes et leur mise en scène digne des plus grands films.
La relation entre Joel et Ellie dans le premier volet, puis la déconstruction implacable de la vengeance dans le second, offrent des scènes d’une intensité rarement vue dans un jeu vidéo. Tellement fort que HBO en a tiré une série qui a tout raflé aux Emmy Awards, décrochant plus de récompenses que Cinéman, le film de Yann Moix, n’en obtiendra jamais. Comme quoi, le jeu vidéo n’a pas de leçons à recevoir du septième art… ni de ses réalisateurs ratés.
3. The Witness – un défi intellectuel grandeur nature
Si le jeu vidéo était un test de QI, The Witness en serait l’épreuve ultime. Ce puzzle-game propose des centaines d’énigmes qui jouent sur l’observation et la logique. C’est beau, intelligent, et ça donne envie de gribouiller des schémas sur un carnet pour en percer les mystères. On défie Yann Moix d’y jouer et de dire ensuite que "ça abrutit".
4. Red Dead Redemption 2 – une fresque western magistrale
Rockstar n’a pas juste recréé le Far West, ils l’ont ressuscité. Red Dead Redemption 2, c’est un monde ouvert où chaque détail respire l’authenticité : un cheval qui s’ébroue sous la pluie, un soleil couchant qui embrase les montagnes, un dialogue au coin du feu qui en dit long sur l’âme tourmentée de son héros. On y incarne Arthur Morgan, un hors-la-loi à la dérive, pris entre la loyauté envers son gang et l’inévitable chute d’un mode de vie révolu.
C’est lent, contemplatif, parfois brutal, souvent bouleversant. Pas juste un jeu, mais une expérience qui vous colle à la peau bien après avoir posé la manette. Si Moix pense encore que le jeu vidéo ne raconte rien d’intelligent, qu’il prenne le temps de suivre Arthur dans sa dernière chevauchée.
5. This War of Mine – la guerre, sans le prisme hollywoodien
Si Yann Moix veut voir du jeu vidéo qui "fait réfléchir", This War of Mine est un bon candidat. Ici, pas de héros surarmé qui sauve le monde, mais des civils tentant de survivre dans une ville en guerre. Inspiré du siège de Sarajevo, le jeu met en lumière les dilemmes moraux et la brutalité du quotidien en temps de conflit.
6. Journey – une expérience sensorielle incroyable
Un peu de poésie dans ce monde de brutes. Journey est une expérience contemplative où le joueur traverse un désert immense, porté par une bande-son envoûtante et une direction artistique sublime. Pas de violence, pas de dialogues, juste une aventure universelle qui a ému des milliers de joueurs. Si Yann Moix refuse encore d’y voir une forme d’art, on ne peut plus rien pour lui.
7. Ghost of Tsushima – plus classe qu’un film de Kurosawa
Si un jeu peut prouver que le jeu vidéo est un art, c’est bien Ghost of Tsushima. Imaginez un film de samouraïs sublime, sauf que cette fois, c’est vous qui tenez le katana. On y incarne Jin Sakai, dernier espoir de son île envahie par les Mongols. Problème : son code de l’honneur de samouraï l’empêche d’agir en assassin de l’ombre. Dilemme cornélien en perspective.
Mais le vrai chef-d’œuvre, c’est la mise en scène. Pas de boussole, pas de mini-map envahissante : c’est le vent qui vous guide, la lumière qui attire votre œil. Ajoutez à ça des duels dignes des plus grands classiques du cinéma japonais, des paysages à couper le souffle et une bande-son qui sent bon le saké sous les cerisiers en fleurs.
8. BioShock – le jeu qui vous manipule
Au début, BioShock ressemble à un FPS classique : une ville sous-marine en ruine, des ennemis à abattre, une voix qui nous guide. Puis vient le moment où le jeu vous regarde droit dans les yeux et vous dit : "Vous n’avez jamais eu le choix." Et là, tout bascule.
Car BioShock, c’est avant tout une leçon sur la manipulation et l’illusion du libre arbitre. Inspirée de l’objectivisme d’Ayn Rand, Rapture est une utopie qui s’est autodétruite, et le joueur, comme tous ses habitants, n’est qu’un pion dans un système qui le dépasse. La mise en scène du jeu ne se contente pas de raconter cette idée : elle la fait vivre, en vous piégeant comme un pantin que l’on pensait maître de son destin.
9. Outer Wilds – un voyage dont on ne ressort pas indemne
Pas de flingues, pas de niveaux à grinder, juste une fusée bancale, un banjo et un mystère à élucider. Le pitch : vous êtes coincé dans une boucle temporelle de 22 minutes avant que votre système solaire ne parte en fumée. Votre mission ? Explorer, observer, comprendre. Chaque planète a ses secrets, chaque découverte en entraîne une autre, et chaque mort vous rapproche un peu plus de la vérité. C’est un jeu qui ne prend jamais par la main, mais qui récompense la curiosité comme aucun autre. Le tout sur fond d’une bande-son à faire pleurer un robot.
10. Minecraft – quand le jeu vidéo devient un terrain d’expérimentation sans limites
Si un jeu prouve que le jeu vidéo peut être autre chose qu’un simple passe-temps, c’est bien Minecraft. On y a vu des joueurs recréer des villes entières, bâtir des machines complexes en redstone, ou même concevoir des expériences scientifiques. Certains profs s’en servent pour enseigner l’histoire ou les maths, des chercheurs l’utilisent pour détecter des troubles cognitifs, et des architectes testent leurs idées dedans avant de les réaliser dans la vraie vie.
Minecraft, c’est un bac à sable où tout est possible, un espace de liberté totale qui mélange créativité, réflexion et apprentissage. Dire que le jeu vidéo abrutit, c’est passer à côté de cette incroyable capacité à transformer n’importe quel joueur en bâtisseur, artiste ou inventeur.